Comment sensibiliser ses salariés aux risques psychosociaux ?
Comment définir les risques psychosociaux (RPS) ?
53% des français disent avoir connu un épisode de souffrance psychique au cours des 12 derniers mois.
Les risques psychosociaux représentent une menace pour la qualité de vie et les conditions de travail : stress, de harcèlement, de discrimination ou encore de violence.
Ces situations sont parfois interdépendantes et peuvent à terme former des cercles vicieux dans l’environnement psychologique professionnel. C’est-à-dire que de la discrimination peut se transformer en harcèlement, du harcèlement devenir de la violence et ainsi de suite.
La santé mentale est en grande partie dépendante de l’organisation de l’environnement au travail : les formations et la prévention aident à améliorer cet aspect.
On identifie 4 familles de risques psychosociaux au travail :
L’épuisement professionnel
Burn out
Le burn out est un état d’épuisement physique, émotionnel et mental, causé par un stress professionnel chronique. Il se caractérise par un sentiment de fatigue intense, de désillusion et de perte de motivation.
Les personnes souffrant d’un burn out ressentent de la fatigue persistante, de l’irritabilité, de l’anxiété sont sujets à la dépression. On note généralement une diminution de la performance au travail ainsi qu’un sentiment de cynisme ou de détachement par rapport à leur travail.
Bore out
Le bore-out se caractérise par un ennui extrême. Les personnes souffrant de bore-out peuvent se sentir sous-utilisées, désengagées et inefficaces dans leur emploi.
Ils incluent le manque de motivation, l’absentéisme, la procrastination, la baisse de la productivité et des sentiments de frustration ou de dévalorisation.
Brown out
Le brown-out s’illustre par un désengagement progressif et une perte d’intérêt pour son travail. Les personnes souffrant de brown-out peuvent continuer à travailler, mais de manière désintéressée et sans motivation.
Il en résulte un manque de satisfaction au travail, un sentiment de vide, une diminution de l’implication dans les projets professionnels et parfois, un cynisme croissant à l’égard de l’entreprise.
Harcèlement moral et sexuel
Harcèlement moral
Le harcèlement moral se caractérise par des comportements abusifs et répétés qui visent à déstabiliser, humilier ou isoler un individu, créant ainsi un environnement de travail hostile.
Voici quelques exemples de situations qui constituent du harcèlement moral :
- Critiques constantes ou remarques dégradantes
- Humiliations ou railleries en public
- Isolement délibéré d’un·e employé·e des activités sociales ou professionnelles
- Imposition de tâches irréalisables ou réduction des responsabilités de manière injustifiée
- Rétention d’informations essentielles à l’accomplissement du travail
- Propagation de rumeurs ou calomnies
Harcèlement sexuel
Le harcèlement sexuel implique des comportements ou propos à connotation sexuelle non désirés, qui portent atteinte à la dignité de la personne ou créent un environnement intimidant, hostile ou offensant.
Voici quelques exemples de harcèlement sexuel :
- Propos, blagues ou gestes à connotation sexuelle
- Avances sexuelles non désirées ou demandes de faveurs sexuelles
- Envoi de messages, e-mails ou images inappropriées
- Toucher inapproprié ou gestes déplacés.
- Tentatives de séduction persistantes malgré un refus explicite
- Promesses de promotion en échange de faveurs sexuelles ou menaces en cas de refus
Violences sexistes et sexuelles (VSS)
Violences sexistes
Les violences sexistes regroupent tous les comportements, propos ou actes basés sur le sexe ou le genre d’une personne, qui ont pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.
Voici quelques exemples de violences sexistes :
- Commentaires ou blagues dégradantes sur le sexe ou le genre
- Traitement différencié des individus sur la base de leur sexe
- Mise à l’écart ou dévalorisation professionnelle des personnes en raison de leur sexe
Violences sexuelles
Les violences sexuelles incluent tout acte de nature sexuelle commis sans le consentement de la personne concernée. Cela va de l’agression physique à la pression psychologique pour obtenir des faveurs sexuelles.
Voici des exemples de violences sexuelles :
- Agression sexuelle
- Harcèlement sexuel, y compris les remarques à connotation sexuelle non désirées
- Pression pour des relations sexuelles non consenties
Discrimination
Discrimination directe
La discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre dans une situation comparable, en raison de caractéristiques protégées.
Voici quelques exemples de discrimination directe :
- Refuser une promotion à une femme en raison de son genre
- Ne pas embaucher une personne en raison de sa couleur de peau
Discrimination indirecte
La discrimination indirecte survient lorsqu’une règle ou une politique, apparemment neutre, désavantage une personne ou un groupe partageant une caractéristique protégée, à moins que cette règle ne soit justifiée par un objectif légitime.
Voici des exemples de discrimination indirecte :
- Exiger des employé·e·s qu’ils travaillent certains jours sans tenir compte des fêtes religieuses
- Imposer des critères de taille physique sans lien avec le poste, ce qui pourrait désavantager certaines personnes
Quelles sont les obligations d’un employeur en matière de Santé et de Sécurité au travail ?
Les obligations des entreprises
Toute entreprise est tenue d’assurer la sécurité et la santé au travail comme le stipule l’article L-4121 du code du travail, l’employeur doit notamment tenir à jour le DUERP (Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels). Celui-ci constitue une preuve de ce qu’il met en place pour garantir le bien-être physique et mental de ses salariés : prévention et formation aux risques psychosociaux, sensibilisation à l’épuisement professionnel ou comportements déplacés, etc…
Les obligations des agences d’intérim et professionnels du travail temporaire
Les agences d’intérim sont soumises aux mêmes obligations en matière de sécurité que les entreprises traditionnelles.
Cependant, elles partagent l’obligation de sécurité face aux risques psychosociaux avec l’entreprise “cliente”, c’est-à-dire l’entreprise dans laquelle va travailler l’intérimaire.
De ce fait, l’entreprise de travail temporaire doit informer l’intérimaire des risques sur la santé physique et mentale ainsi que des dispositions mises en place pour les prévenir. Elle doit notamment assurer le suivi médical et la charge administrative du salarié. Elle partage également l’obligation de prévention des risques avec l’entreprise utilisatrice.
L’entreprise utilisatrice doit former de manière pratique le salarié intérimaire à la sécurité et aux diverses précautions à prendre dans le cadre de sa mission, individuelles et collectives. Dans le cas d’un poste à risques, elle organise le suivi de l’état de santé du salarié.Sinon c’est l’entreprise de travail temporaire qui s’en charge.
L’entreprise cliente est responsable des conditions de travail et assure la formation relative à la sécurité sur le poste.
Les meilleurs outils pour évaluer et sensibiliser aux risques psychosociaux
Évaluer et prévenir l'épuisement professionnel
Evaluer et sensibiliser au burn out
Le burn out peut notamment être causé par une surcharge de travail, un manque de soutien de la part de la direction ou encore un déséquilibre entre vie personnelle et professionnelle.
La gestion du burn out implique la prise de mesures pour réduire le stress au travail, comme la délégation des tâches, la clarification des attentes, la promotion d’un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, ainsi que la recherche d’un soutien professionnel si nécessaire.
Pour mieux gérer ce type de risques au travail, plusieurs outils à déployer en interne existent.
Des entreprises reconnues dans la prévention des risques professionnels proposent notamment des tests de sensibilisation éprouvés. L’approche par questionnaire permet à la fois d’évaluer les connaissances du salarié, mais aussi de le sensibiliser et de le former aux bonnes pratiques en matière de sécurité et de santé.
En complément, le modèle Karasek, créé en 1979 par Robert Karasek, est aussi un outil puissant évaluant l’exposition au stress lors de l’activité professionnelle. Il apprécie également le “job-strain” : déséquilibre entre de fortes exigences et un manque d’autonomie.
Ce modèle fonctionne en analysant les exigences psychologiques (job demand) et la latitude de la décision (job control). Ajouté à cela, la troisième dimension : soutien social, implantée en 1990 nous donne une analyse complète du stress global au travail d’un salarié.
Afin d’alimenter ce modèle, l’on pose donc au candidat une série de 49 questions : le job content questionnaire (JCQ), afin d’adapter selon la personne, les résultats sur le graphique suivant :
Le questionnaire contient notamment des questions de demande psychologique, de latitude décisionnelle et de soutien social.
Evaluer et sensibiliser le bore out
Le bore-out peut être causé par des tâches monotones, un manque de défis, un manque de reconnaissance ou un manque de perspectives d’évolution professionnelle.
La gestion du bore-out implique la recherche de nouvelles responsabilités ou de nouveaux défis au travail, une communication ouverte avec la direction sur les besoins et les aspirations professionnelles, ainsi que la recherche d’opportunités de développement professionnel.
Le WBOS, ou l’échelle du bore-out, au travail est une méthode d’évaluation auto administrée par le salarié. Validée empiriquement lors d’une étude réalisée sur un échantillon de 1000 collaborateurs, cette échelle représente un moyen fiable d’établir l’état des lieux de l’ennui au travail des ressources humaines.
Cette méthode consiste à réaliser un questionnaire sur la base d’une échelle de Likert avec une graduation allant de “Pas du tout d’accord” à “Tout à fait d’accord”.
Dans ce questionnaire, il convient d’inclure plus d’une dizaine de questions autour de trois sujets principaux :
- L’ennui au travail
- Le manque de sens
- Le manque de tâches
Ce type de questionnaire doit être adapté au contexte de votre organisation.Il est particulièrement intéressant de le combiner avec les méthodes de prévention déjà en place dans votre entreprise : RPS, QCVT (qualité et conditions de vie au travail), prévention des risques professionnels…
Evaluer et sensibiliser le brown-out
La gestion du brown-out implique la recherche de sens et de valeur dans son travail, la redéfinition des objectifs professionnels, la recherche de soutien auprès de collègues ou de mentors Il peut aller jusqu’au changement de poste ou d’entreprise si nécessaire.
Bien s’orienter professionnellement représente un moyen d’anticiper le brown out. Le décalage entre les valeurs d’un candidat et d’une entreprise est parfois dû à une mauvaise orientation professionnelle.
Un excellent moyen de prévenir le brown-out est d’effectuer un bilan d’orientation. Il permet de préciser et de connaître ses valeurs et ses attentes afin de faire des choix éclairés de carrière, en termes de poste, d’organisation ou de type d’entreprise.
Les tests de savoir-être évaluent les soft skills (compétences douces). Ils aident à mieux cerner la personnalité, mais aussi les motivations et les attentes. Cela permet d’appréhender la manière de travailler et la compatibilité du profil par rapport au fonctionnement et à la culture d’entreprise.
Ces deux outils combinés offrent un moyen efficace de prévenir le brown-out.
Évaluer et prévenir le harcèlement
Le harcèlement moral et sexuel au travail est un problème grave qui peut avoir des conséquences néfastes sur les individus et l’environnement de travail.
Comprendre ces formes de harcèlement, reconnaître les signes avant-coureurs et savoir comment réagir est crucial pour assurer un milieu de travail sûr et respectueux pour tous.
Harcèlement moral
Heinz Leymann, psychologue de renom et auteur du livre “Mobbing, la persécution au travail”, s’est spécialisé dans le domaine du harcèlement moral. Il a mis au point un modèle de questionnaire, le Leymann inventory of psychological terror (LIPT), permettant d’identifier la présence de harcèlement moral en entreprise.
Ce modèle a été conçu après la réalisation d’une étude sur plus de 300 entretiens individuels. Il a permis de détecter 45 comportements de violences psychologiques au travail.
Ces 45 comportement de violences psychologiques se répartissent en 5 catégories :
- Les agissements empêchant la personne de s’exprimer
- Les agissements visant à isoler la personne
- Les agissements visant à discréditer la personne dans le travail
- Les agissements visant à déconsidérer la personne auprès des collègues
- Les agissements visant à compromettre la santé de la personne
Harcèlement sexuel
En France, en moyenne, le harcèlement sexuel touche 1 femme sur 40 et 1 homme sur 80, chez les 20-69 ans.
La formation est essentielle dans la prévention de ce type de comportement et doit notamment aborder :
- La création d’un climat social de confiance et de respect
- La déconstruction des stéréotypes
- La formation des collaborateurs en tant que témoins actifs “bystanders”
- Faire un briefing des moyens de signaler ces comportements
Evaluer et sensibiliser les violences sexistes et sexuelles (VSS)
Les violences sexistes et sexuelles peuvent avoir un impact dévastateur sur la santé mentale et physique des victimes, ainsi que sur leur carrière professionnelle.
Un environnement de travail toxique peut entraîner une diminution de la productivité, une augmentation de l’absentéisme et des dommages à la réputation de l’entreprise.
De plus, les violences sexistes et sexuelles font partie des formes d’atteinte à la personne les moins déclarées par les civils. En effet, en 2022 selon le rapport du ministère sur la sécurité sur un total de 247 000 violences sexuelles physiques (hors cadre familial), seulement 5% ont été déclarées. De plus, sur 1 322 000 cas de violences sexuelles non physiques (toujours hors cadre familial), 2% des victimes seulement ont déclaré les faits à l’autorité.
Il existe un tabou autour des victimes de ces violences : la peur d’être jugé par ses proches ou un sentiment de mal-être vis-à-vis de soi-même, qui pousse les personnes ayant subi une VSS à ne pas se manifester.
Sensibiliser et former autour de ces sujets aide à réduire cette forme de silence et encourage à prendre la parole. Chacun(e) doit se sentir soutenu(e) au sein de son entreprise et légitime à dénoncer ces faits.
Ainsi, chaque entreprise se doit de mettre en œuvre des mesures de sensibilisation et de prévention sur ces risques potentiels grâce à des ateliers, des tests spécifiques ou des actions de sensibilisation collective.
Evaluer et sensibiliser à la discrimination
La discrimination au travail se manifeste par des traitements inéquitables ou préjudiciables, basés sur des caractéristiques personnelles, telles que le sexe, l’âge, le handicap, l’orientation sexuelle, la religion, l’origine ethnique, etc.
Elle peut prendre diverses formes et avoir un impact négatif significatif sur l’individu concerné et sur l’environnement de travail dans son ensemble. Il est crucial de promouvoir l’égalité et l’inclusion pour favoriser un milieu de travail respectueux et donc productif.
9% des personnes en emploi déclarent avoir été victimes de discrimination au travail, soit près de 1 personne sur 10.
En 2022, le rapport du ministère de l’Intérieur français sur l’étude des atteintes à la personne, les discriminations comptent parmi les infractions les moins manifestées par les victimes, avec 1 056 000 de cas durant l’année 2022 (hors cadre familial) et seulement 2% déclarées.
Qu’il s’agisse de discrimination directe ou non, cette proportion reste conséquente dans le milieu professionnel.
La formation joue donc un rôle clé pour réduire la discrimination en entreprise. Une étude menée par le groupe Adecco auprès des responsables des Ressources Humaines ayant été formés sur le sujet de la discrimination montre de très bons résultats. En effet, suite à la formation, 42% déclarent pouvoir désormais évaluer et détecter des situations discriminantes et 90% d’entre eux pouvoir gérer une situation de ce genre.
Chez les responsables des Ressources Humaines qui n’ont pas étés formés, seulement 15% se déclarent capables d’identifier un comportement ou un contexte discriminatoire et 77% pouvoir gérer cela.
Ainsi, mettre en place une campagne de formation et de sensibilisation au cœur de votre stratégie managériale, permet un fort impact dans la prise de conscience et la réduction de ce type de comportements néfastes en entreprise. Des outils en ligne dédiés à ces thématiques facilitent ces démarches délicates de sensibilisation et de prévention.
Ces méthodes de prévention et de formation aux risques psychosociaux,, permettent de tenir à jour le DUERP. Ils apportent des preuves concrètes de la mise en place de mesures afin d’améliorer la qualité de vie et les conditions de travail.
Cela représente également une protection juridique pour les entreprises de plus de 50 salariés, pour qui la législation est plus stricte concernant la prévention des risques professionnels.
De plus, dans une entreprise, favoriser un climat sain et des garanties de sécurité agira directement sur la motivation et le bien-être de ses salariés, et donc sur leur productivité. Une démarche gagnant-gagnant en somme !